Carnet de voyage

  • Gilles Cyr
    Huit sorties. Les Éditions de l'Hexagone (purchase at Amazon.ca)
Reviewed by Anne Kaufman

Huit sorties suit, de proche, le chemin de son narrateur aux prises avec un désir d’authenticité. Il tente de dépasser le « mur », celui qui donne son nom au premier chapitre du recueil. Un sentiment l’habite, qu’il doit éliminer. « Dans l’intervalle je vois que rien / n’est vraiment à sa place. » Le regard est porté avec inquiétude vers un bouleversement sans nom, vers la fin de la quiétude : « suivez mon regard / on doit s’inquiéter / quand ils partent en forêt / avec leurs quatre-roues ». Comme si le silence des lieux était sur le point de disparaître, détruit par l’Homme. « Enfin réunis dans une communauté d’indignés », il faut partir à la recherche de la vraie essence humaine. Foncièrement mobile, la voix narrative témoigne de son passage d’un lieu à l’autre : Hull, la Sicile, Licata, Syracuse, l’île de Crète, la Macédoine. Véritable « carnet de voyage », les différents espaces s’enchaînent comme chacune des huit avenues ou « sorties » que tentent d’emprunter le narrateur. L’arbre, le jardin, l’Arménie, le papillon, la pomme, la recherche, incarnent les outils qui servent à désamorcer le mur. L’errance rythme le recueil, jusque dans la nature, parfois précédée par un guide. Cependant, le voyageur sera « encore perdu », inévitablement. En voyage, les plaisirs de la cuisine, les festins et les marchés populaires permettent d’explorer un vocabulaire pointilleux qui reflète le climat de recherche sérieuse où tout est noté. C’est aussi l’occasion de faire une série de rencontres. Les histoires étrangères, d’« un autre mythe cherokee / lié à la colère / [qui] raconte l’invention des fraises » les peintres Cézanne, Huygens et Papin, réels personnages. Le trajet est ponctué d’objets, eux aussi soumis à l’étude : la pomme, l’hirondelle et le café, par exemple. Le tout pour passer un « mur », jamais tout à fait décrit, et ne privant pas du désir de vouloir toujours aller plus loin; « pour renouer / nous irons le plus loin possible / au-delà des scories dérangeantes / des ratages ponctuels ». Ce genre d’occupation, conclut le narrateur, « serait absolument moderne ». C’est peut-être, un peu ironiquement, par le geste moderne de l’errance, que le recueil propose certaines réponses.



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