Le Silence obsce?ne des miroirs. Lévesque éditeur
Ce roman de Daniel Castillo Durante aborde des the?mes pluto?t classiques en litte?rature, l’identite? (ou sa perte), l’exil, les amours de?chus, etc., mais avec un regard contemporain aiguise?. Bien ancre? dans le vingt-et-unie?me sie?cle, l’auteur de?ploie une interculturalite? qui nous me?ne autant dans les recoins subtils de l’identite? mixte du personnage principal, dont les racines se trouvent a? la fois a? Montre?al et en Argentine, que dans les liens qu’il tisse entre la culture populaire et l’e?rudition.
La double identite? du protagoniste, qui nous rame?ne a? celle de l’auteur, Que?be?cois d’origine argentine, nous offre un roman aux accents complexes pour un lecteur qui ne serait pas familier avec la culture hispano-ame?ricaine et la langue espagnole. Ponctue? de multiples re?fe?rences ge?ographiques, linguistiques et culturelles a? l’Argentine, le roman n’est pas pour autant herme?tique et reste tout de me?me accessible au grand public qui saura sans doute appre?cier les nombreuses intrigues qui s’entrecroisent et l’humour souvent noir de l’auteur.
La recherche identitaire du personnage principal, porte?e par la perte de ses papiers en terre e?trange?re, nous rame?ne aux grandes questions touchant le ve?ritable fondement de notre identite?. Cette perte le met en situation d’apatride sans papier, mais le plonge e?galement au cœur d’un questionnement qui l’ame?ne a? replonger ses racines dans cet « entre » de l’interculturalite?, a? la frontie?re de ses diverses appartenances.
Cette interculturalite? ne se manifeste cependant pas seulement a? travers les diffe?rents espaces culturels qui ont forme? l’auteur et le protagoniste de son roman, mais e?galement a? travers l’encheve?trement de ses re?fe?rences. Passant de la culture 2.0 de l’In- ternet a? des re?fe?rences pointues sur des auteurs plus ou moins connus, il nous me?ne dans un voyage litte?raire fort inte?ressant faisant e?cho, de manie?re assez explicite, a? Jorge Luis Borges et a? sa fiction d’e?rudition. D’ailleurs, les connaissances litte?raires de l’auteur se re?ve?lent par la mai?trise d’une narration touffue et l’utilisation de proce?de?s offrant une lecture a? plusieurs niveaux. Ainsi, le titre du roman renvoie a? celui de la dernie?re fiction de Borges. Le protagoniste de?couvre d’ailleurs qu’il en est peut-e?tre le personnage principal. On sent e?galement l’influence de Borges lorsque le narrateur fait re?fe?rence a? des œuvres a? l’existence incertaine, comme cet ouvrage encyclope?dique du dix-septie?me sie?cle portant sur les divers fessiers du monde.
En somme, l’e?crivain nous offre un roman fort plaisant a? lire, mais tout de me?me exigeant. Les diverses pe?ripe?ties du personnage principal sont divertissantes, nous tiennent en haleine, et nous donnent en me?me temps a? re?fle?chir sur des questions profondes qui restent en suspens.